Une identité à la hauteur de ses valeurs et de ses engagements ?
Vous avez forcément déjà aperçu le logo des JO 2024. On vous en a d’ailleurs parlé dans notre article « Design Éthique : En chemin vers la durabilité et la responsabilité » pour sa conception éco-consciente et éco-responsable. Le logo principal rassemble trois symboles iconiques : la médaille d’or pour le dépassement de soi, la flamme olympique pour le mythe prométhéen et la Marianne, figure de la parisienne émancipée et libre. Et, pour la première fois dans l’histoire, les Jeux Olympiques et Paralympiques s’inscriront dans la même identité, dans une même vision.
Sur le papier, l’idée plaît et nous séduit. On voit, en ce projet, la promesse d’un emblème plein de significations positives et encourageantes pour nos athlètes. Dans la réalité, l’identité divise et crée le débat dans la communauté créative et sur les réseaux sociaux où les internautes ne cessent de tourner son usage en dérision.
D’un côté, on est heureux de voir une figure féminine porter l’évènement (bien loin de la pensée de Pierre de Coubertin à la fondation des Jeux modernes, alors même qu’il souhaitait empêcher la pratique du sport aux femmes). De l’autre, on a la sensation de se trouver face à un mélange entre le logo Tinder Gold et celui d’un salon de coiffure. Une flamme, un brushing parfait, une bouche parfaitement dessinée : des stéréotypes de genre qui ne servent finalement pas très bien la cause égalitaire d’abord défendue par ce projet, qui symbolisera, le temps d’un été mémorable, les premiers JO à la parité parfaite chez les athlètes…
Le noir, le blanc et l’or seront les couleurs identitaires de la marque Paris 2024. Mais, pour porter l’évènement, 7 couleurs symboliques sont sélectionnées dans le paysage français : le bleu lavande, le bleu de Sèvres, le rouge amour, le corail Tahiti, le jaune Matisse, le gris zinc, le vert Opéra et le vert feuille de chêne. Ces teintes vibrantes, saturées, caractérielles, vont se repérer de loin mais ne semblent finalement plus correspondre aux engagements écologiques fixés pour cette identité en dépassant largement le seuil d’encrage de 100% fixé comme limite.
La typographie, elle, s’inspire amplement du courant Art déco. Direction les années folles pour imaginer une police de caractère variable, permettant de limiter la consommation d’encre et d’énergie. On retrouve les arches des motifs à la Gatsby, et le doré qui souligne le style de l’époque. Mais, la gamme de couleurs ultra flashy choisie siéra-t-elle aussi bien aux courbes délicates de la typo star ?
Des pictogrammes qui remplissent leur rôle ?
Sur ces premières bases, on cherche une cohérence, un lien, un fil conducteur. Et, si on peine déjà à le trouver, l’arrivée des pictogrammes de Paris 2024 ne va pas nous aider. Bien qu’ils aient remporté un prix Or lors du Grand Prix Stratégies du sport et de l’E-sport en Novembre 2023, notre avis est partagé.
Pour rappel, ces pictogrammes ont été mis en place, à l’époque, dans le but de créer une harmonisation et un langage pictural universel qui serait non-verbal et donc compréhensible par tout le monde. Finit la barrière de la langue, on facilite les déplacements sur les sites sportifs en supprimant les influences culturelles et linguistiques.
Alors que les pictogrammes animés des JO de Tokyo en 2020 avaient mis tout le monde d’accord en alliant lisibilité, modernité et équilibre, ceux de Paris 2024 nous laissent perplexes. Il semble que, sur l’échelle d’iconocité, les “blasons” dessinés pour l’occasion se rapprochent plus du schéma voire de l’illustration, et ne répondent donc pas du tout aux fonctions que nous leur attribuons : de l’esthétique en dépit du pratique…
On vous met d’ailleurs au défi de réussir à reconnaître toutes les disciplines dans ce petit quiz :
Une tenue qui rassemble ?
Le second prix Or remporté pendant le Grand Prix Stratégies du sport et de l’E-sport récompense l’identité visuelle de l’Équipe de France qui réunit à nouveau les athlètes Olympiques et Paralympiques sous un même symbole et un même maillot. Le coq français est représenté de face, un bec en V de Victoire et une crête enflammée, le tout sur un fond dégradé bleu, blanc et rouge. Encore une fois, il y a discussion tant sur la cohérence et la compréhension du logo que sur le choix du gradient principal. Les couleurs de la France, oui. Mais comme ça, pas forcément. Modernité ou “nostalgie”, difficile de se positionner.
Et, puisque la Tour Eiffel n’a pas été conservée dans l’identité principale, pourquoi ne pas l’intégrer aux médailles ? Le métal d’origine du monument ornera une partie de chacune des médailles des Jeux Olympiques et Paralympiques. Ici, on choisit 3 symboles, différents de ceux du logo : l’hexagone, le rayonnement et le sertissage. Une face avant commune, et une face arrière qu’on ne comprend pas tout à fait. Les bijoux des Jeux Olympiques seront gravés de la représentation de la déesse de la victoire Athéna Niké devant le stade Panathénaïque, l’Acropole et la Tour Eiffel. Pour les Paralympiques, on se contentera d’une vue en contre-plongée du dessous de la Dame de fer. Là encore, on ne comprend pas tout.
Un début pourtant prometteur.
On vous l’accorde, ça fait beaucoup, et on ne sait plus trop où donner de la tête. On regrette beaucoup le logo de la candidature de Paris réalisé par l’agence Dragon Rouge qui était, pour nous, le logo parfait. Simple, astucieux, malin : il rassemblait toutes les qualités recherchées. On attendait beaucoup de la suite du projet, et on peut légitimement se poser la question sur ce changement de direction.
Et, quand on a vu la refonte de l’identité des Jeux Olympiques en 2022 avec son style suisse universel (et ses pictogrammes intemporels), on voyait du bon pour nos JO à domicile ! À sa révélation par le Comité International Olympique, on sentait l’air frais flotter au dessus l’institution. Cohérence, impact et modernité : un joli travail réalisé par l’agence Canadienne Hulse & Durrell.
Le système de grille et les formes géométriques reprennent les fondements du Bauhaus et sont déclinables à l’infini. Le tout permet la mise en place d’éléments graphiques forts, de motifs représentatifs. Les artistes Francesco Ciccolella, Karan Singh et Abbey Lossing se rassemblent pour créer un ensemble d’illustrations qui vont porter les valeurs des JO. En bref, tout a été pensé pour être coupé, adapté, inclu sur tous les supports.
Si vous êtes motivés, et que ça vous intéresse, vous pouvez télécharger la charte complète juste ici :